Je vois que non...
je continue, un peu, le reste étant sur mon blog-defouloir :laugh:
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Une chose en entraîne une autre. Un pas, un autre pas. Un mot, puis un autre… sans qu’on s’en rende compte. Penser à une chose, puis une autre… Se faire une idée… Le rencontrer, le regarder, le sentir… Tant de choses qui fond mal, qui se répète… tant de choses inutiles. Pourquoi ne pas rester allongé, comptez les secondes, regardez les minutes s’envoler, voir son souffle se figer au-dessus de soi, former un nuage et pleuvoir des gouttes assises.
Sentir sa peau se flétrir au contact du vent, ses ongles se racornir, sa vue se brouiller, l’air manquer. Pourquoi toujours vouloir faire, entreprendre, construire… ? Qu’espère-t-on réellement de nos vies sans relief, dispersé aux quatre vents comme les feuilles mortes d’automnes qui achèveront de toute façon leurs routes dans une benne à ordure, où avec un peu de chance, elles se poseront sur un cours d’eau, une rivière, une mer ou un océan ? Je n’aime pas ces mots-là : faire, entreprendre, construire. Cette idée de se lancer dans un projet, en suer sang et eau pour que tout marche, pour que tout tienne droit, que rien ne s’effondre. Surtout pas ce beau château de cartes que l’on a mis des heures à faire tenir. Il a une tour en plus, ce château, peut-être même des créneaux si c’est un château de sable.
Peu importe la matière… papier, sable, chair…
Tout s’effiloche comme les collants en laine que l’on trouve dans n’importe quel supermarché de n’importe quel coin du monde… Tout se fane… Ces graines que l’on s’évertue à planter à chaque printemps, pour pouvoir se pâmer devant un beau jardin bien fleuri pendant, allez… trois mois d’affilé… Uniquement pour voir leurs pollens flotter dans l’air, s’infiltrer dans les naseaux de pauvres badauds allergiques qui iront crier « docteur, j’ai mal à la tête, au ventre, au dos… soignez-moi, retardez l’heure tragique, fatidique de ma mort… couchez des noms barbares sur vos feuilles blanches, donnez moi ma drogue, un palliatif, quelque chose qui me fera respirer plus longtemps, plus sereinement, qui me fera oublier mon pauvre c½ur fatigué.. » et enfin, voir mes roses se faner comme la beauté de mon visage, dont les traits se plieront, s’accentueront un jour sous le poids de mes chaires ramollies.
Juste m’allonger, me taire et vous faire taire. Ecouter le silence, les murmures alentours, épiez les conversations entre ma chaise et mon armoire, car elles aussi, pauvres meubles en bois mort, ont envie de parler, de s’exprimer. Juste nous faire taire, qu’on arrête cette mascarade. Depuis la nuit des temps, conquérir cet amas de boue sèche par endroit, glacé aux pôles, innondé parfois, apposer notre marque, dire que l’on a existé, que l’on a été, le graver sur les murs dans des grottes qui mettront des millions d’années avant d’être retrouvées et restaurées pour le plus grand plaisir d’enfants chahuteurs et bruyants – qui n’en ont rien a foutre d’ailleurs de ces foutus hommes préhistoriques qui ont fini par crever, comme on crevera nous aussi – et de grands adultes perdus qui croient avoir donné un sens à leur vie grâce à la spéléologie ou l’archéologie – mais on s’en fout aussi d’eux…
On a tellement besoin d’être reconnu, de faire la course pour quelques milliers d’étoiles, sans remarquer que plus on avance, plus elles paraissent lointaines.
Je suis fatiguée pour vous qui perdez votre temps à vouloir, toujours vouloir plus… qui vous multipliez sans arrêt, vous n’arrêtez pas, comme des petits lapins idiots qui continuent à se gratouiller le derrière de leurs grandes oreilles, à se taper le cul par terre et à bouffer leurs satanées carottes, parce qu’ils sont comme nous en fait. Ils ont leur fonctionnement, leurs habitudes de lapins, comme nous, ils n’ont rien d’autre à faire de leurs vies.
S’allonger, fermer les yeux. Laisser la fin nous brûler le ventre, notre langue s’assécher. Lorsque nous n’aurons plus mal, alors il sera temps de partir. Pourquoi s’acharner à laisser des marques sur un sol déjà marqué ? Nous ne sommes personnes, juste une poignée de fourmis avides lâchées dans une fourmilière immense, ne cessant de grouiller, de chercher, de demander Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? C’est pathétique cette envie de faire, d’entreprendre, de construire… Se masquer la réalité. Qui a dit Je suis un borgne dans un royaume d’aveugle ? Refuser de voir que quoiqu’il arrive, quoique nous fassions, nous nous éteindrons le jour où notre maître-chien décidera qu’il est temps de nous faire piquer, ayant enfin pitié de nous voir nous débattre dans notre pauvre carcasse décharnée, rongée par la vieillesse, la maladie ou quoi d’autre encore ? N’ayant plus la force de lever la patte, nous n’amusons même plus la galerie.
Nous nous prenons pour des maîtres alors qu’en fait, nous ne faisons que tester la longueur de nos laisses.