Re : L'OPCA peut-il refuser un contrat pro ?
Pour avoir travaillé une dizaine d'années auprès d'OPCAs, j'aimerais compléter le post de titetitounette.
Un OPCA ne peut refuser un contrat de professionnalisation "en prévention" d'un refus de la DiRRECTE que lorsque le contrat est illégal: +26 ans non demandeur d'emploi, étranger sans visa de travail ou autorisation temporaire de la DiRRECTE, entreprise radiée, etc.
Le poste à pourvoir dans l'entreprise requérante et donc la formation liée ne peuvent constituer un motif de refus "préventif" du contrat, l'OPCA doit le transmettre à la DiRRECTE mais peut refuser de participer au financement de la formation. Elle formule alors un "avis défavorable" à la DiRRECTE. Elle doit motiver cet avis par écrit auprès de l'employeur qui peut ensuite s'adresser à la DiRRECTE et trouver d'autres modes de financement de la formation : changement d'OPCA pour un OPCA inter-branches, autofinancement de la formation, déplacement du salarié sur une filiale qui dépend d'un autre OPCA, etc.
Concernant les formations "prioritaires":
Un accord de branche peut prévoir pour une période donnée de favoriser tels types de formation ou telles qualifications.
Le choix de ces actions de formation dites "prioritaires" résulte de négociations entre représentants employés et employeurs selon les besoins de qualification du secteur et les intérêts des salariés.
L'OPCA, association composées de représentants employés et employeurs, se charge de collecter/mutualiser la participation obligatoire des entreprises à la formation professionnelle puis de redistribuer le fond constitué (frais de fonctionnement déduits) pour le financement de formations supposées profitables au secteur.
Lorsqu'un accord de branche donne la priorité à certaines formations, il n'interdit cependant pas le financement d'autres actions. "Priorité" n'est pas synonyme d'"exclusivité".
Pour ces "autres" actions, l'entreprise requérante doit en montrer la pertinence pour le maintien ou la croissance de son activité ainsi que pour l'employabilité du ou des employés concernés.
C'est là que l'interprétation/l'application des accords par certains OPCA ou certains conseillers est parfois très discutable.
Exemple :
Une entreprise du secteur du textile demande à son OPCA le financement d'un contrat de professionnalisation sur un poste de support informatique pour son siège administratif.
Son besoin est réel : nombre croissant de salariés utilisant un poste informatique, complexité croissante des ressources informatiques pour servir les nouvelles applications
métiers et répondre aux nouvelles normes qualité, intervenants de SSII insatisfaisants donc trop coûteux, etc.
Un candidat, ancien salarié de la restauration, inscrit à pole emploi depuis plusieurs mois et motivé à rebondir par les métiers de l'informatique, convient au poste.
L'entreprise et le candidat ont choisis un organisme de formation dont l'offre de formation répond respectivement aux besoins de compétences du premier et aux ambitions de qualification du second.
L'OPCA refuse le contrat sous motif que la formation assortie n'est pas prioritaire, qu'elle n'est pas diplômante ou pis qu'elle ne correspond pas à un métier de la branche.
Pourtant :
- quel secteur fonctionne aujourd'hui sans informatique ?
- une qualification doit-elle systématiquement emprunter un parcours diplômant pour être acquise et reconnue (pas d'après nos voisins Européens, ni le Etats-Unis, cf. CEDEFOP) ?
Rien n'oblige l'OPCA à refuser un tel contrat par lequel ET entreprise ET salarié sont gagnants. Mais le financement accordé représenterai d'autant moins à investir dans les
actions prioritaires prévues par accord, c'est sur ce point qu'il y a parfois crispation. L'OPCA obnubilé par l'interêt "global" du secteur refuse de considérer tout intérêt spécifique/particulier à certaines de ses entreprises adhérentes. Il réserve ainsi son fond pour le financement d'hypothétiques demandes ultérieures correspondant exactement aux actions prioritaires. Il n'est pas rare que faute de ces dernières demandes, un OPCA se trouve excédentaire à l'approche de sa clôture fiscale. L'utilisation de l'excédent est
aussi très dicutable, mais c'est un autre débat.
Selon la Sixième Partie VI du Code du Travail qui régit "LA FORMATION PROFESSIONNELLE TOUT AU LONG DE LA VIE", L'OPCA a pour mission:
"[...]
1° De contribuer au développement de la formation professionnelle continue ;
2° D'informer, de sensibiliser et d'accompagner les entreprises dans l'analyse et la définition de leurs besoins en matière de formation professionnelle ;
3° De participer à l'identification des compétences et des qualifications mobilisables au sein de l'entreprise et à la définition des besoins collectifs et individuels au regard de la stratégie de l'entreprise, en prenant en compte les objectifs définis par les accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Pour l'accomplissement de leurs missions, les organismes collecteurs paritaires agréés assurent un service de PROXIMITé au bénéfice des très petites, petites et moyennes entreprises [...]"
Le Code du Travail prévoit que l'OPCA participe à favoriser/pérenniser l'emploi par la mise en oeuvre de financements de formations adaptées aux besoins de compétences/qualification des entreprises requérantes.
Dans l'exemple ci-dessus, en refusant de soutenir un contrat de professionnalisation bénéfique à l'employeur comme au salarié et accompagnés par un organisme de formation dont ils reconnaissent conjointement la capacité à former le salarié, l'OPCA sort de sa mission. Malheureusement, cela arrive (trop) souvent.