Oooooh
En voilà un sujet passionnant !
Il y aurait tant de choses à dire sur ce bouquin, sur son auteur, sur ce coup de génie que bons nombres d'écrivains espèrent naïvement pondre comme première oeuvre.
Déjà, la première chose qui saute aux yeux c'est le pacifisme de Céline. On le sent, dès les premières pages : Céline déteste la guerre, ne supporte pas la vue des morts, du sang, de la viande. Il ne ferait pas de mal à une mouche (et encore moins à un juif, malgré tout ce qu'il a pu dire, en bon provocateur, dans
Bagatelle pour un massacre). On sent l'hygiéniste.
Ce petit passage au début du bouquin, quand il se ballade avec sa première "femme", Lola l'américaine, est clair :
- Oh ! Vous êtes donc tout à fait lâche, Ferdinand! Vous êtes répugnant comme un rat...
- Oui, tout à fait lâche, Lola, je refuse la guerre et tout ce qu'il y a dedans... Je ne la déplore pas moi... Je ne me résigne pas moi... Je ne pleurniche pas dessus moi... Je la refuse net, avec tous les hommes qu'elle contient, je ne veux rien avoir à faire avec eux, avec elle. Seraient-ils neuf cent quatre-vingt-quinze millions et moi tout seul, c'est eux qui ont tort, Lola, et c'est moi qui ai raison, parce que je suis le seul à savoir ce que je veux : je ne veux pas mourir.
- Mais c'est impossible de refuser la guerre, Ferdinand! Il n'y a que les fous et les lâches qui refusent la guerre quand leur Patrie est en danger...
- Alors vivent les fous et les lâches! Ou plutôt survivent les fous et les lâches! (...)
Et c'est vrai, je me souviens, qu'à ma première lecture, j'avais été quelque peu surpris par le langage utilisé, cet style vulgaire.
Faut un petit temps d'adaptation.
Mais sous ces airs d'inculte se cache une puissance inimaginable.
Tout au long de ce voyage, des campagnes en guerre à l'Amérique, il verbalise cruement l'ineffable.
Un très grand roman. Sans conteste l'un des meilleurs romans du XXème siècle (sinon le meilleur ? A voir...).