Sur le Handicap, laissons parler ceux qui connaissent la question
Sur le Handicap, laissons parler ceux qui connaissent la question :
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POLITIQUE
Accrochage Sarkozy-Royal : Retour sur le handicap
Inexistant jusqu’ici, le thème du handicap a surgi violemment lorsque Ségolène Royal s’est déclarée scandalisée sur les propos de Nicolas Sarkozy sur l’accueil d’enfants handicapés dans les école lors du débat télévisé de mercredi soir. Une grosse colère qui a le mérite de mettre en avant la situation difficile des handicapés.
“Je ne perds pas mes nerfs, je suis en colère, il y a des colères très saines”. Ségolène Royal s’emporte lorsque Nicolas Sarkozy décrit, “la larme à l’oeil”, la situation des handicapés dans les écoles. L’accrochage est soudain provocant sans surprise une succession de réactions. Et d’abord celle des associations en liant avec l’andicap. L’APF (Association des paralysées de France), l’association la plus influente, déplore le manque de moyens pour l’éducation des enfants handicapés. Et ce en dépit de la loi handicap 2005 qui permet aux familles de faire valoir le droit à l’éducation de leurs enfants. “Alors que Mme Royal et M. Sarkozy se sont opposés mercredi soir sur la question de la scolarisation des enfants en situation de handicap, l’APF tient à rappeler qu’au-delà des statistiques, c’est bien la qualité de l’accueil et de l’accompagnement des enfants qui est en jeu aujourd’hui”, indique M. Barbier, président de l’Association des paralysés de France (APF). En effet, les associations s’entendent sur le nombre “très insuffisant” d’AVS. L’APF déplore “un nombre insuffisant d’auxiliaires de vie scolaire (AVS), de réelles lacunes dans la formation et la pérennité de ces personnels”, et constate “un retard et des dysfonctionnements dans l’installation du nouveau dispositif, les enseignants référents n’étant pas encore tous nommés”. Même credo à l’Unpai, l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (750 associations représentant 60 000 familles) qui réclame “des moyens d’information et de formation pour les enseignants” soient “mis en oeuvre sans délais ainsi qu’un statut et une formation pour les assistants de vie scolaire (AVS) et les emplois de vie scolaire (EVS)”. L’APF (Paralysés de France) et la fédération des Apajh (adultes et jeunes handicapés) soulignent que l’on compte “un accompagnant pour 17 élèves”, et condamnent aussi “de réelles lacunes dans la formation et la pérennité de ces personnels”. Certains enfants risquent d’être déscolarisés, disent-ils, quand l’AVS quitte ses fonctions. “Les enfants accueillis ne sont épaulés que quelques heures par des personnes non formées et précaires”, a affirmé Jack Lang, conseiller de Ségolène Royal et ancien ministre de l’Education nationale, selon qui “les chiffres sont truqués et ne doivent pas faire illusion”. Aujourd’hui, se défend le ministre de la Santé Philippe Bas, “20 000 enfants handicapés bénéficient d’un accompagnement individualisé, contre 4 000 en 2003”. La grande majorité des enfants handicapés scolarisés ne sont pas accompagnés, soit faute d’AVS, soit parce qu’ils peuvent se débrouiller seuls. Leur nombre a progressé à un rythme régulier chaque année : 90 000 en 2002, 107 000 en 2003, 138 800 en 2004, 160 000 à la rentrée 2006. Depuis la loi de février 2005, la scolarisation dans l’établissement le plus proche du domicile est un “droit”, ce qui conduit les associations à dire qu’il n’est pas nécessaire de décréter, comme le propose Nicolas Sarkozy, un “droit opposable”. “Le droit opposable existe déjà”, affirme Jean-Marie Barbier, président de l’APF, qui s’étonne aussi du délai de 5 ans avancé par M. Sarkozy avant de se tourner devant les tribunaux. “Si un enfant doit attendre 5 ans pour rentrer au cours préparatoire, il y a quelque chose qui ne va pas”, dit-il. Si les associations saluent “l’ intérêt porté aux difficultés des personnes handicapées mentales et de leurs familles”, selon l’Unpai, Elles regrettent que cette question ait fait irruption aussi “tardivement dans la campagne électorale” et “déplore que la question du handicap soit apparue comme un enjeu d’affrontement électoral”. Bref, les associations ont renvoyé Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal dos à dos sur la scolarisation des enfants handicapés.“C’est bien beau de vouloir accueillir les enfants handicapés mais il faut aussi s’en donner les moyens”, estime Nelsie Rigal-Boullenger, présidente d’une association marseillaise, “A petits pas”.
- Le pourquoi de la colère de Royal
Piquée au vif par la proposition de M. Sarkozy de créer un “droit opposable” à la scolarisation des handicapés, Mme Royal a reproché à la droite d’avoir “supprimé” son plan Handiscol. Ce plan avait bousculé les corporatismes pour faire admettre dans des classes ordinaires les enfants handicapés, accompagnés d’aides éducateurs, des emplois-jeunes gérés par les associations. Elle a vivement reproché à Nicolas Sarkozy la suppression de ce plan, assurant que "moins d’un enfant sur deux qui était accueilli il y a cinq ans dans l’Ecole de la République l’est encore aujourd’hui". Handiscol, présenté le 3 février 1999, s’appuyait sur le recrutement de milliers d’"auxiliaires d’intégration" (7 000 selon la candidate mercredi), des emplois-jeunes chargés d’assister les enfants à l’intérieur même des classes. Mais il s’est heurté à un manque de moyens, puis à l’arrêt des recrutements d’emplois jeunes à partir de 2002. Ce plan devait permettre de doubler le nombre de handicapés accueillis dans le système scolaire, tous handicaps confondus. A l’époque, seulement un enfant sur trois était scolarisé, la plupart du temps dans des structures spécialisées hospitalières, médico-éducatives ou socio-éducatives. La situation était perçue par les familles comme une "ségrégation" et un "déni de droit des personnes handicapées", selon le guide Handiscol distribué à l’époque. En 2001, le rapport annuel du médiateur de l’Education nationale a mis en valeur l’ampleur des défis et des blocages qu’Handiscol devait affronter, en soulignant "la multiplication des cas de conflits entre les parents et l’institution scolaire", notamment pour les parents d’enfants qui ont des "troubles psychologiques aux frontières du handicap". Devenue ministre de la Famille, Ségolène Royal, avec Jack Lang à l’Education, a poursuivi son action pour l’intégration des handicapés à l’Ecole. "Lorsque les autres enfants sont témoins du courage et de la détermination" des enfants plus fragiles, il font eux aussi "des efforts" pour travailler, répétait-elle alors pour convaincre enseignants et familles d’enfants "normaux", parfois réticentes à l’arrivée d’enfants jugés perturbateurs dans les classes. Le même rapport du médiateur rappelait d’ailleurs que l’action vigoureuse de Ségolène Royal en faveur de l’intégration des handicapés à l’Ecole avait "fait naître chez certains parents l’idée que les enfants handicapés se voyaient reconnaître des droits nouveaux".