Bon ça manque pas les pistes sur la presse gratuite. Il n'est qu'à voir ce qu'en pensent les journalistes de la presse payante. Quelques idées et un article ci-dessous (paru dans le quotidien québécois La Presse):
- la presse payante souffre-t-elle réellement d'une concurrence des gratuits, en termes de lectorat ou de parts de marché publicitaires.
- Qui est le plus menacé par la presse gratuite.
- Qu'est ce qui fait son succés ?
- Quelle est la différence en terme de contenu, (pourcentages articles, dépêches, pub) entre un gratuit et un payant ? etc
Bonne chance
Ludovic Hirtzmann
Dans La Presse.
Le mercredi 1er septembre 2004
Photo Alain Roberge, La Presse
Coauteur de l'essai, Le Défi des quotidiens gratuits, Ludovic Hirtzmann, correspondant de plusieurs journaux français au Canada, croit que les journaux gratuits ont chambardé le marché médiatique au Québec et en France en brisant les monopoles
Qui a peur des quotidiens gratuits?
Laura-Julie Perreault
La Presse
Une concurrence déloyale pour les journaux traditionnels. La fin du journalisme. Un modèle de conquête du monde de l'information. Il y a un peu plus de trois ans, toutes les prédictions rivalisaient d'alarmisme lorsque le petit journal Métro a atterri dans le réseau de transport en commun montréalais.
À Métro international, compagnie fondée à Stockholm en 1995 et maintenant implantée dans 37 grandes villes du monde - New York étant le dernier champ de bataille gagné par l'entreprise en mai 2004 - on se faisait rassurant: les journaux gratuits, distribués dans les transports en commun, avaient pour but de convertir les non-lecteurs urbains, jeunes, bien nantis, actifs, à la lecture des quotidiens... ou en d'autres termes, préparer le lectorat de demain du New York Times, du Monde ou de La Presse.
Le correspondant de plusieurs journaux français au Québec, dont La Presse, Ludovic Hirtzmann, et un mordu des médias qui a emprunté le pseudonyme de François Martin, ont décidé il y a trois ans de séparer le cliché de la vérité, la prédiction de la réalité. Étudiant l'impact des quotidiens gratuits sur les marchés montréalais et parisien, les auteurs de l'essai Le Défi des quotidiens gratuits concluent que s'il n'y a pas de raison de prédire l'apocalypse des journaux, il serait aussi faux de sous-estimer la part du lectorat et du marché de la publicité sur laquelle les publications gratuites ont mis la patte.
Malgré leurs efforts, les gestionnaires de Métro International n'ont pas réussi à s'approprier le marché des publicités mondiales en offrant aux annonceurs des journaux à Hong Kong comme à Rome.
Mais à Zurich, à Londres et à Stockholm, où des données précises de lectorat sont disponibles, l'implantation des gratuits a fait chuter le lectorat des quotidiens payant de 3,5% à 10% entre 1998 et 2000. À Montréal, entre 2001 et 2003, tous les quotidiens ont perdu quelques poils. Il est cependant impossible d'évaluer quel rôle a joué l'apparition des gratuits dans cette légère baisse.
C'est aux tabloïds que les analystes prévoyaient des jours plus durs après l'invasion des quotidiens gratuits. En publiant près de 98% de nouvelles brèves, plus de 50% de publicité et des photos couleurs, c'est dans le marché du Journal de Montréal et du Parisien que semblaient puiser les nouvelles publications.
Mais les constats de Ludovic Hirtzman et François Martin sont tout autres. «Les victimes ne seront peut-être pas celles qu'on attend. Au Québec, Le Devoir peine à maintenir son tirage; en France, Libération semble prendre le choc de plein fouet», écrivent les auteurs.
«Les plus faibles sont ceux qui souffrent de l'arrivée des gratuits dans le marché publicitaire», ajoute M. Hirtzmann en entrevue, en remarquant que les propriétaires des grandes entreprises de presse disposent de plus de ressources pour concurrencer les nouveaux venus.
«En plus, au Québec, les patrons de presse ont mieux compris le phénomène des gratuits qu'en France. Au lieu de les concurrencer, ils se sont alliés aux nouveaux journaux». À Montréal, le groupe Gesca, propriétaire de La Presse, est associé au journal Métro et Québécor publie 24 heures.
Ce journal quotidien né des cendres de Montréal métropolitain, lancé en 2001, a été débouté en cour à la mi-juillet dans sa tentative de briser le monopole de distribution que la Société des transports de Montréal a accordé à Métro. «Je pense qu'il n'y a de la place que pour un journal gratuit dans n'importe quel marché. Mais le phénomène est là pour rester. Le preuve, Métro a plus de 400 000 lecteurs à Montréal», remarque M. Hirtzmann.
Le sort du journalisme remis en cause
Si Ludovic Hirtzmann craint peu pour l'avenir des journaux, il n'est pas aussi optimiste à l'endroit du journalisme. «Les journalistes d'aujourd'hui sont de plus en plus des fonctionnaires de la plume. Ils ne sortent plus de leur bureau, ils utilisent Internet comme principale source d'information. L'arrivée des journaux gratuits, qui ont annoncé leur couleur en disant que leurs journalistes auraient d'abord pour but de résumer des dépêches de presse, a permis de constater que le journalisme est en crise», tranche le correspondant du Figaro. Selon lui, la révision des maquettes des grands journaux, très à la mode depuis 2000, ne suffira pas à assurer la pérennité des payants.
Pour justifier le prix des journaux traditionnels, continue-t-il, les journalistes devront en faire plus: aller sur le terrain, faire de l'enquête, affiner les analyses. «Ce qui tue les payants en ce moment, c'est l'utilisation trop grande des agences de presse. Le Métro a 98% d'articles brefs, mais Le Devoir n'est pas loin derrière avec 61%. Est-ce que la différence est suffisante pour que le lecteur achète un journal? Les gratuits ont brisé les monopoles et les payants vont devoir en faire plus».